Quelle place pour le numérique responsable dans les entreprises ?

Denis Didier, membre du groupe ISIA et  expert en sustainable IT, nous explique l’importance d’une implication dans le numérique responsable de nos jours.

Présentation et expérience  

Je suis Denis Didier, j’ai un profil de CTO, de direction technique. J’ai commencé ma carrière informatique en gérant des serveurs pour des applications bancaires sur minitels, j’ai participé aux transformations de l’IT avec l’arrivée de Unix/linux, les réseaux IP suivi de l’internet, l’open source, les systèmes d’information distribués, la voix et la vidéo sur IP aux USA.

Les grandes mutations et les challenges qui vont avec m’attirent.

Les impacts du digital, ne sont pas qu’un nouveau challenge pour moi mais bien une nécessité de transformation, c’est ce qui m’a rapproché de l’Institut du Numérique Responsable (INR) et m’a permis de m’impliquer dans ce domaine en pilotant la production du référentiel d’éco-conception de l’INR : le GR491.

J’ai trouvé dans le Groupe ISIA, une ESN qui existe depuis 1996, une structure intelligente, agile avec une vision extrêmement claire de sa responsabilité pour construire un numérique au service d’une société responsable et des personnes passionnées pour mettre en œuvre l’intelligence collective au service de cette vision.

Depuis plusieurs années dans le Groupe ISIA, je participe à la création des offres Numériques Responsable, des parcours de formations NR, j’apporte et transmet aussi l’expertise NR dans les projets clients ou pour les collaborateurs internes.

Le NR étant en perpétuel mouvement, la R&D est indispensable. C’est la raison d’être du LABO NR dont je m’occupe.

État du green iT et difficultés observées de nos jours

Dans la majorité des organisations, les impacts du numérique sont un point d’attention, mais qui se propage de manière très disparate.

Parfois ce sont des individualités qui poussent le sujet dans leur sphère d’influence opérationnelle, sans vraiment réussir à essaimer.

Parfois ce sont des directions générales, des directions RSE ou DSI qui intègrent le Numérique Responsable dans leurs stratégies environnementales, mais les relais n’étant pas prêts, la mise en œuvre est souvent déceptive.

Dans les deux cas : bottom-up ou top-down les démarches se heurtent à des difficultés, les principales étant une absence ou une imprécision de la vision NR, une maturité globale insuffisante pour permettre un engagement massif de tous les acteurs (pas uniquement les fonctions techniques), une communication pas assez structurée pour fédérer et permettre l’adhésion de toutes les parties prenantes.  

Adopter une démarche numérique responsable en 2022

Sans doute, avant de se demander comment adopter une démarche NR, il est primordial de répondre à la question « POURQUOI ? ».

Pourquoi un industriel dont 90% des émissions de gaz à effet de serre sont liées à sa production industrielle se lancerait dans une démarche NR ?

L’accompagnement des organisations pour poser cette vision NR et construire une stratégie NR avec une gouvernance formée est indéniablement une première étape indispensable.

En aparté, pour répondre à la question posée pour notre exemple industriel, il est bon de rappeler que le NR ce n’est pas que le CO2, mais aussi les matières premières, l’eau, l’énergie ainsi que les enjeux humains, sociaux et sociétaux. Donc le CO2 : oui, mais pas que cela, CQFD : un industriel est aussi impliqué !

Pour avancer sereinement dans une démarche NR, chacun a besoin de comprendre de quoi nous parlons, c’est le rôle des sensibilisations et formations.

Il faut engager tous les acteurs dans cette transition, c’est la mission de la communication.

Il est indispensable de comprendre la situation de départ, cela se fait avec des audits de maturité, des mesures d’empreintes environnementales des systèmes d’information.

Une vision NR + une gouvernance + des acteurs informés et sensibilisés + une conduite du changement structurée + un état des lieux : la somme de tout cela donnera une feuille de route et un plan d’action efficace ainsi que des « quick-wins » impactants.

Dans quelles mesures l’informatique devient de plus en plus responsable ?

Sans doute par nécessité avec l’arrivée de réglementations récentes (Loi AGEC, loi REEN) mais au-delà des aspects contraignants à venir il s’agit aussi d’assurer la pérennité des capacités digitales, car nous avons besoin du numérique ; mais d’un numérique sobre pas exponentiel.

La raréfaction de certaines ressources, les problèmes d’approvisionnement, les tensions géopolitiques, les questions énergétiques, les coûts et impacts des déchets électroniques et bien sur les enjeux climatiques sont autant d’aiguillons qui amènent naturellement le numérique vers plus de sobriété.

Le choix qu’il nous reste est simple ; nous subissons avec sans cesse un temps de retard pour nous adapter ou nous anticipons pour éviter de nous générer des problèmes qui nous coûtent très chers à résoudre à court terme.

L’avenir du numérique responsable

L’écosystème NR est rayonnant et brillant en France, je pense que nous allons aussi progresser lorsque d’autres territoires vont avancer sur ces sujets et amener d’autres pistes pour adresser les enjeux et impacts du numérique. Beaucoup de monde garde un œil et une oreille attentive à ce qui se passe à l’étranger (USA-Amériques, Asie-Pacifique).

En attendant cela, je pense que je pourrai dire « on a fait le job », lorsque le NR sera traité systématiquement dans toutes les étapes de cycle de vie des ressources digitales : équipements, logiciels, réseaux, data.

La cybersécurité est aussi un enjeu transverse que l’on retrouve dans toutes les organisations (pas que dans les DSI), plus personne ne fait l’impasse sur la sécurité.

Lorsque le NR sera intégré dans les pratiques des organisations de la même manière que la cybersécurité, on sera pas mal !